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Photo du rédacteurElma Vergerolle

« CRIMINALISONS LE VIOL », LE DOULOUREUX COMBAT DES FEMMES EN GUINÉE

Dernière mise à jour : 31 oct. 2022

En Guinée, plus de 400 plaintes pour viols ont été enregistrées sur l’année 2021, ce qui en fait un problème de société et de santé publique. La mauvaise prise en charge des victimes, l’impunité des violeurs et le manque de prévention renforcent la culture du viol.

© SIA KAMBOU/AFP

Le samedi 20 novembre 2021, le décès de M’mah Sylla, une femme guinéenne de 25 ans, émeut tout le pays. Son supplice débute lorsqu’elle se rend à la clinique de son quartier pour des maux de ventre. Le prétendu médecin l’anesthésie et la viole, elle tombe enceinte. Dès lors, il accepte de lui pratiquer une IVG et la viole à nouveau durant leur rendez-vous. Il enverra ensuite M’mah Sylla chez un complice afin de réaliser une échographie, celui-ci la viole à son tour. Lorsqu’elle parvient à se défaire de l’emprise de ses agresseurs, elle est entre la vie et la mort. Ses intestins ont nécrosés, elle est évacuée à Tunis. Les médecins tentent, en vain, de la soigner.


Ce triste événement engendre une vague de protestations sur le pays. « Nous réclamons justice pour M’mah Sylla ainsi que pour toutes les autres victimes silencieuses qui fuient les regards de la société », exige Mariama Ciré Diallo, porte-parole des manifestantes de Labé. Ces manifestions sont aussi le fruit d’un ras-le-bol collectif. 2 à 3 viols par jours sont enregistrés chaque jours à Conakry, la capitale. Ce chiffre compte une surreprésentation importante de jeunes filles mineures.



L'UNIFORME QUI PROTÈGE

Les enquêtes réalisées par Amnesty International révèlent qu’une majorité des viols sont commis dans le cercle familial ou dans le voisinage. Une autre part importante des viols sont perpétrés par des personnes dites « du corps savant », les enseignants, les religieux, les médecins... Ces personnes bénéficient d’une position sociale favorisée et respectée ce qui leur procure une certaine immunité. Les proches de la victime choisissent souvent le silence afin de ne pas compromettre la communauté, de ne pas entacher la réputation familiale.


Les forces de l’ordre et de sécurité sont aussi très présentes dans les cas de viols et agressions sexuelles. Le massacre du 28 septembre en est l’illustration la plus parlante. Le 28 septembre 2009, une manifestation a lieu contre les projets du chef de la junte militaire, la répression est sanglante. La tuerie fait plus de 150 morts parmi les manifestants, et plus de 109 filles et femmes sont violées. 13 ans plus tard, un procès est ouvert et met fin à de longues années d’impunité « C’est une mise en rupture avec le passé et une mise en conformité avec les recommandations du conseil des droits de l’Homme de l’ONU », selon les propos d’ Alphonse Charles Wright, le Ministre de la justice guinéen.



UNE DOUBLE PEINE POUR LES VICTIMES

« La honte doit changer de camp ». C’est le titre qu’Amnesty international a attribué à son rapport sur les violences sexuelles en Guinée. Le viol est un sujet très peu documenté, les chiffres ne sont que des estimations car il reste un sujet tabou. Les victimes sont confrontées à la stigmatisation sociale, ce qui les encourage au silence et les isole. Une jeune anonyme en témoigne devant les caméras de la chaine d’information TV5monde : « Tout le quartier en parle et se moque de moi, j’ai honte pour mes parents, j’ai mal. Actuellement, je ne sors plus

parce qu’on me montre du doigt ».


Les victimes ont souvent des difficulté d’accès aux soins médicaux et au soutien psychologique. Le plan national de développement sanitaire établit par la Guinée en 2015 fait l'observation d’un système de santé défaillant. Les lieux de santé sont parfois vétustes et inégalement répartis sur le territoire les équipes de soins en sous-effectif. Les femmes violées sont sujettes à la pression sociale et doivent garder le silence en plus d’être privée d’un accès aux soins de qualité.


La situation est dramatique et les associations de défense des droits de l’Hommes misent beaucoup sur la prévention et l’éducation de la jeunesse. C’est l’arme qui semble la plus nefficace face à une culture du viol bien ancrée et des dizaines d’années d’impunité.

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